Jean Castex, un ex-Premier ministre qui accumule les casquettes dans le transport
Homme de terrain rompu au dialogue social et aux échanges avec les élus, l'ex-Premier ministre Jean Castex coche plusieurs cases pour diriger la SNCF, dont il rêvait de prendre les commandes.
S'il n'est pas cheminot comme son prédécesseur Jean-Pierre Farandou, parti piloter le ministère du Travail, ce passionné de train peut au moins se targuer d'avoir fait la Une de "La vie du rail", l'hebdomadaire spécialisé dans le ferroviaire, en juin 2021, lorsqu'il a soutenu et financé la relance des trains de nuit.
En trois ans à la tête de la Régie des transports de Paris et sa région (RATP), où il avait été reconduit il y a un an, il a rempli la mission principale pour laquelle il avait été nommé: garantir des transports de qualité en Ile-de-France pendant les Jeux olympiques.
La partie n'était pas gagnée à son arrivée en novembre 2022, avec un service très dégradé en raison d'une pénurie de personnel liée notamment à la "grande démission" de la période post-covid, d'un absentéisme endémique et de grèves sporadiques pour dénoncer l'ouverture à la concurrence du réseau de bus.
Avec l'aide d'un "sac à dos social" négocié par la branche des transports et d'une relance de l'habitat social au profit des salariés de la RATP, Jean Castex arrache des accords sociaux, octroie des hausses de salaires et lance des plans de recrutement qui ont remis l'entreprise sur les rails.
Sa plus grande fierté, a-t-il confié à l'AFP début octobre, repose sur les "450.000 CV reçus à la RATP" depuis son arrivée.
- Accent du sud-ouest -
L'ancien maire de Prades (Pyrénées-Orientales) né dans le Gers, qui a conservé un léger accent du sud-ouest, compte user à la SNCF de la même méthode qu'à la RATP et à Matignon, avec des sorties sur le terrain quasiment quotidiennes.
Les syndicats l'apprécient - FO réclamera même qu'il soit reconduit à son poste à la RATP. Les résultats financiers, peu flamboyants durant son premier mandat, sont en amélioration.
Sous sa présidence, la RATP a affiché des pertes sur ses activités transport en 2023 et 2024, en partie à cause du choc inflationniste qui a suivi l'invasion de l'Ukraine par la Russie et un bond de 400 millions d'euros de la facture énergétique. Au premier semestre 2025, le groupe est revenu dans le vert, avec un bénéfice de 153 millions d'euros.
L'ouverture à la concurrence du réseau de bus de Paris et de sa petite couronne a également été une "révolution" pour la régie, selon son propre aveu: la RATP a perdu l'exploitation de dizaines de lignes au profit de ses concurrents Keolis, Transdev ou ATM.
Mais au final, elle est parvenue à remporter huit des 12 lots mis en concurrence, soit 70% du chiffre d'affaires et 75% du personnel. "Ce bilan est au-delà des objectifs que j'avais initialement fixés", s'est félicité M. Castex dans Le Monde mercredi.
Petit-fils de sénateur, formé à l'ENA, passé par la Cour des comptes, Jean Castex est aussi rompu aux rouages de l'Etat et aux négociations techniques: ancien directeur de cabinet de Xavier Bertrand aux ministères de la Santé et du Travail, secrétaire général adjoint de l'Elysée sous Nicolas Sarkozy, puis délégué interministériel aux JO-2024.
- Popularité -
Le grand public le découvre le 3 juillet 2020, lors de sa nomination surprise à Matignon, où sa mise quelque peu désuète deviendra familière des Français.
Il est l'homme qui organise le premier déconfinement, les couvre-feux successifs qui suivent le rythme des vagues de l'épidémie, mais aussi "le quoi qu'il en coûte" pendant une période de crise où la priorité est la protection des Français.
Après Matignon, Jean Castex renonce aux avantages des anciens Premier ministres (chauffeur, protection rapprochée, collaborateur), ce qui contribue à sa popularité.
Avant d'arriver à la SNCF, il a proposé de se "déporter" systématiquement de la préparation des appels d'offre à la concurrence sur lesquels la RATP serait aussi en compétition, pour éviter les conflits d'intérêt avec son ancienne mission.
Ce fin connaisseur des petites lignes ferroviaires qui a répété son attachement à l'aménagement du territoire lors de ses auditions de pré-nomination, sera immédiatement confronté au dur de la modernisation du réseau ferré français vieillissant, sur fonds de disette budgétaire, et surtout au développement de la grande vitesse et la concurrence internationale.
Il est marié et père de quatre filles.
R.Marconi--IM